Centre de Méditation Bouddhique Vimalakirti
Questions et Réponses suivant  « Le Bouddhisme en quelques mots” par Joseph Goldstein
Mardi 9 avril 2013

Traduction, Sla

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Je pense que d’une certaine manière il y a peut-­‐être un manque de clarté, non de sens, mais de langage car, quand vous dites que vous sentez une consistance dans ces 80 ans et plus de « Dina », je le comprends quant à moi comme étant une certaine consistance du schéma. Nous sommes tous conditionnés de manière assez consistante par les schémas habituels de nos vies. Et je pense que c’est ce que vous ressentez et que c’est ce que nous ressentons tous. Nous pouvons nous voir comme ayant un passé et traversant certaines expériences et projetant le passé dans l’avenir. Dans ce sens, je pense que l’on peut parler de consistance. Quand on parle d’absence de soi, c’est un sujet très subtil. Il n’est pas facile à comprendre immédiatement, cela demande de la pratique et de la réflexion. Dire ou parler de l’absence de soi consiste simplement à dire que -­‐ cela peut être un défi -­‐ qu’il n’y a personne derrière le schéma habituel. Ce que nous appelons le Soi Est le schéma consistant. C’est dans ce sens que nous pouvons parler du Soi. En fait, quelqu’un a posé la question a un enseignant tibétain : « Le Soi est-­‐il réel ? » et l’enseignant a dit : « Oui, le Soi est réel, mais pas réellement réel » !
Je pense que c’est un très bon enseignement car, il est réel, de la façon conventionnelle que nous avons de nous comprendre nous-­‐mêmes et le monde qui nous entoure et je crois que c’est à cela que vous vous référiez. Il y a un schéma consistant dans notre vie, c’est dans ce sens que nous pouvons dire oui, le soi est réel. Mais quand nous observons plus soigneusement le schéma, qui est consistant, nous voyons qu’aucun substratum sous-­‐jacent n’est transporté d’une façon quelconque, ou ne lui appartient et que Nous Sommes le flot de l’expérience du changement.
Vous avez tout le temps pour atteindre l’éveil ! Pas de problème ! Parce que…c’est toujours, à tout instant vous savez, c’est comme si, je ne sais pas si l’image est tout à fait correcte mais, à tout instant, nous sommes, ou conscients de ce qui se passe, ou non. Le choix est là.
Oui, c’est tout, à tout instant. Nous ne faisons que pratiquer, être conscients davantage d’instants. Pratique hors du temps et sans âge.
Il s’agit d’un point intéressant et il montre la distinction entre deux mots, venus des traditions orientales , qui sont parfois utilisés de manière interchangeable alors qu’en réalité ils signifient des choses différentes.
Les deux mots auxquels vous vous êtes référée dans votre commentaire, sont la Réincarnation et la Renaissance.
Le mot Réincarnation est souvent employé dans une approche philosophique hindoue.
Ce mot n’a pas été utilisé dans les enseignements bouddhiques. Il a employé le terme Renaissance, pourquoi?
Parce qu’ il faut, pour qu’il y ait Réincarnation, qu’un être passe de vie en vie, un être qui soit réincarné, de sorte que ce qui était dans une vie antérieure revienne pour ainsi dire dans la vie suivante.
L’enseignement bouddhique diverge quelque peu sur ce point. Il a donc employé le mot Renaissance afin de suggérer ou de dire, qu’il y a une continuité dans le processus . Et c’est peut-­‐ être à cela que vous vous référiez. Nous pouvons voir cela dans cette vie-­‐même, pas la vie suivante, juste dans cette vie. Ce processus n’est pas chaotique. Lorsque nous nous réveillons le matin et qu’il y a cette familiarité, les schémas sont présents, le conditionnement, les habitudes, tout est là. Et c’est ainsi que chaque instant conditionne l’apparition de l’instant suivant…
Je vais vous donner un exemple. Vous plantez un pépin de pomme, vous l’arrosez et le pépin germe et il grandit, et il y a de petite graines puis un arbre, puis de nouvelles pommes, de nouveaux pépins et ainsi de suite. Ce n’est pas que le premier pépin ait été transporté dans l’arbre, dans le fruit, dans… non, c’est que le pépin fait partie du processus de devenir, de changer. Le pépin devient ceci, devient cela, devient un nouvel arbre, devient un nouveau pépin. Ce que le Bouddha dit, c’est qu’aucun élément n’est transporté mais qu’il y a un processus de continuité. Alors, juste pour comprendre cette distinction, je pense aussi, en entendant ce que vous avez dit, qu’il s’agit d’être clairs sur la différence qu’il y a entre un processus de continuité dans cette vie et, selon les enseignements, de vie en vie. On dit que la conscience au moment de la mort conditionne l’apparition de la conscience de la nouvelle renaissance, mais rien n’est transporté.
Je pense que, notre façon d’explorer ceci, parce que la plupart d’entre nous n’a pas le pouvoir de voir -­‐peut-­‐être certains d’entre vous l’ont , je ne sais pas-­‐ les vies passées ou les vies futures – mais nous pouvons voir et examiner comment ce processus se déroule maintenant, instant après instant. Et en le voyant plus clairement, nous pouvons alors avoir une intuition : « Oh si cela arrive ainsi maintenant, peut-­‐être est-­‐ce ainsi que le processus continue ».
Ce que je pense ou ce que je voudrais dire est, si vous pouviez appeler ce processus en changement, le Soi ! Ce n’est pas exactement la façon dont ce serait exprimé dans les enseignements bouddhiques mais je pense que c’est une manière raisonnable d’utiliser ce terme.. l’important étant que, même si nous appelons le processus Soi, il n’y a rien là de permanent, qu’il y a un processus de changement.
Je voudrais dire que ces questions s’orientent vers les aspects les plus profonds des enseignements bouddhiques. Donc si ce n’est pas tout à fait clair, ne vous inquiétez pas, cela demande beaucoup de réflexion et de compréhension et de pratique pour réellement commencer à le comprendre à des niveaux de plus en plus profonds.
Parler de cela , comme ce soir par exemple, permet ou suggère quelques idées et façons de réfléchir à ce sujet.
L’une des choses que j’apprécie tant dans les enseignements du Bouddha, et que mes maîtres m’ont enseigné, est qu’il n’a jamais été question pour vous de devoir croire ceci. En fait, je voudrais vous suggérer de ne pas le croire, ce sont juste des suggestions pour vos investigations. Voyez et apprenez par vous-­‐même.
Je pense qu’il s’agit là d’un point très important qui, selon moi, indique deux choses. Il indique la restriction inhérente au concept. Lorsqu’on utilise un mot pour décrire quelque chose, le mot ne peut jamais la décrire complètement, parce que c’est un concept, c’est un mot, ce n’est pas l’expérience. Je pense donc que vous avez tout à fait raison quand vous dites qu’un concept sera toujours restreint et je pense aussi que ce qui constitue un pas vraiment important dans le processus méditatif, c’est quand nous passons du niveau du concept au niveau de l’expérience directe.
Nous allons procéder maintenant à une petite expérience. Vu que la plupart d’entre vous a, j’imagine, passablement médité, ça ne sera pas une surprise pour vous. Mais, faites comme si vous n’aviez jamais médité auparavant. Vous venez juste de la rue, vous ne savez pas de quoi il s’agit, vous pensiez peut-­‐être qu’il y aurait un dîner gratuit ou quelque chose dans le genre !
Vous joignez vos mains, n’importe comment, pas d’une façon particulière. Les deux mains se touchent. Si vous êtes cette personne ordinaire et que je vous demande : « Que sentez-­‐vous ? » je pense que la plupart des gens vont dire, de manière conventionnelle : « Je sens mes mains ». N’est-­‐ce pas ?
Mais pas vous! Parce que vous êtes des méditants ! et vous réalisez que nous ne sentons pas nos mains. Il n’existe pas de sensation appelée « main ». Ce que nous sentons quand nous sommes à ce niveau, quand notre attention est vraiment focalisée sur percevoir les sensations elles-­‐ mêmes, il se passe des choses très intéressantes ! L’une d’elles est que la notion de main disparaît réellement. Lorsque nous sommes juste dans la sensation, il n’y a réellement pas de main. Et la raison pour laquelle c’est si important est que lorsque nous sommes au niveau « expérientiel », plutôt qu’au niveau conceptuel, au niveau « expérientiel » nous percevons le changement constant. Vous savez, nous ressentons réellement ces sensations, ce n’est pas statique, c’est « pffuit », les vibrations, les changements de température et beaucoup de changements.
Quand on est au niveau conceptuel « Main ». « Main » aujourd’hui, j’avais une « Main » hier j’aurai une « Main » demain, le mot ne change pas. Ainsi donc il n’y a pas que « Vie et Mort » qui soit un important concept, même le concept « Inspiration et Expiration », est un concept. Il n’y a pas de sensation appelée Respiration. Ce que l’on ressent vraiment c’est peut-­‐être de la chaleur, ou un chatouillement ou une petite pression et, à ce niveau, nous voyons le changement momentané. Ce déplacement de niveau est donc très important et comprendre la différence d’avec les concepts qui sont communs. Nous vivons une grande partie de notre vie dans le monde du concept.
Juste pour vous donner un exemple de concept. Il y en a beaucoup qui dominent réellement nos vies, mais l’un d’eux a une immense influence sur nos vies et, pour la plupart des gens, il est un énorme fardeau. C’est le concept du Temps, le concept du Passé et du Futur.
Quand vous commencez vraiment à regarder, je ne parle pas philosophiquement maintenant, je parle de la façon dont nous expérimentons le passé et le futur. Ce qui se passe, nous sommes assis, ou nous vivons nos vies, et nous avons certains types de pensées, ou d’images à l’esprit, de souvenirs. Nous appliquons un concept à ces types de pensées. Le « Passé », puis dans une sorte de gymnastique mentale, nous prenons ce concept « Passé », que nous venons de créer et « pffuit » nous le renvoyons en arrière en quelque sorte, comme si le passé était quelque part là derrière, comme une réalité. Mais ce qui est notre réelle expérience du passé, est une pensée dans l’Instant.
Nous faisons de même avec le futur. Nous sommes simplement assis là, nous occupant de nos affaires. Toutes sortes de pensées , planifier, imaginer, fantasmer au sujet de nos prochaines vacances. Nous avons donc ces pensées ou ces images et nous prenons le concept « Futur », « pffuit », nous le jetons devant nous comme si le futur était là quelque part, à nous attendre. Et de nouveau, je ne parle pas de métaphysique, je parle de la façon dont nous vivons l’expérience. La seule manière dont nous avons l’expérience du futur est la pensée de l’Instant.

J’ai eu cette intuition de manière fulgurante. J’étais dans les « Peace Corps » en Thaïlande, j’étais jeune, environ 20-­‐21 ans, et j’ai choisi comme projet pour mes deux ans, de lire – je vais essayer mon français sur vous, soyez prêts ! « A la recherche du temps perdu ». C’était un important projet, un livre volumineux ! Je ne me souviens plus de grand-­‐chose mais je me souviens que quelque part, dans les cinquante ou cent dernières pages, il y a toute cette discussion sur la nature du temps et sa compréhension que le passé existe dans le présent… Après avoir passé un peu plus d’une année à lire ce gros livre, mon esprit était en quelque sorte prêt à comprendre et à dire : « Oh oui, le passé est maintenant, comme pensée », et sur cette lancée mon esprit : « Oh si le passé est ainsi, le futur aussi » ! Et il y eut cet étonnant allègement du cœur ! Parce qu’il dit, si nous traversons nos vies en portant la montagne du passé et du futur sur nos épaules, savez-­‐ vous combien de notre temps, combien de nos vies sont employées à se soucier du passé, ou à rêvasser au sujet du passé, ou d’anxiété à propos du futur. Nous passons une immense partie de nos vies à créer une réalité, un concept du passé et du futur. Et voir si clairement : « C’est juste un concept » ! Tout ce qui se passe réellement, c’est certaines pensées dans l’esprit et la pensée, comme pensée, est très légère. Une pensée ne pèse presque rien, c’est « pffuit » !
Je ne suis pas en train de dire que le contenu des pensées n’a pas d’importance. Parce qu’ elles sont souvent importantes et que nous devons en adresser le contenu. Mais c’est très différent si nous prenons cette pensée comme étant une pensée dans le présent, comme quelque chose qui est apparu et qui maintenant passe , ou si nous la prenons comme cet immense concept « Passé et Futur » ! C’est une façon très différente de vivre notre vie !
C’est une longue histoire sur le sujet des concepts, pour dire que nous vivons une grande partie de nos vies dans les concepts et que cela a un très grand pouvoir de conditionnement sur la manière dont nous vivons. Et la méditation est une manière de voir réellement la différence entre un concept et ce qui arrive d’instant en instant.
A cet égard, la méditation n’est pas un hobby. Il s’agit réellement de nos vies, de la manière dont nous vivons. Et c’est afin de vivre en plus ou moins grande liberté, aisance et paix , que nous faisons tous cet important travail.
Voilà, ça pourrait être une bonne note pour conclure
Merci.

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